Agrandir le mouvement “de l’intérieur”

03/02/2019

Cette nouvelle réflexion intègre un élément de recherche martiale que je souhaite partager avec vous. Personnellement je pense qu'il ne suffit pas de faire de grands mouvements pour prétendre pratiquer un bon karaté. Par "mouvement", je fais ici référence à des mouvements externes c'est à dire des mouvements directement visibles à l'œil. Le pratiquant doit comprendre avec l'expérience qu'il existe en fait plusieurs niveaux de mouvements dans les arts martiaux.

J'en distinguerai deux :

  • Mouvement volontaire de niveau 1 (MVN1) : il s'agit de mouvement volontaire que chacun de nous est capable d'exécuter et de visualiser avec ses yeux.

Exemple : quand je tends la bras pour réaliser un tsuki, je vois mon bras se tendre progressivement.

  • Mouvement volontaire de niveau 2 (MVN2) : il s'agit de mouvement volontaire subtil par rapport au premier. Je le caractériserai ici comme un "mouvement volontaire dans le mouvement de niveau 1". Ce mouvement est guidé par un travail fin d'intention (Yi).

Exemple : l'action de tendre le bras pour réaliser tsuki (MVN1) peut être complété par un mouvement complémentaire dans le bras (MVN2). Ce mouvement complémentaire, ne se voit pas avec nos yeux mais se ressent concrètement grâce à une conscience corporelle travaillée et affinée. En réalisant tsuki ainsi, on réalise alors un double mouvement : l'un visible (MVN1) et l'autre invisible (MVN2), ce dernier ayant des conséquences directes sur l'exécution du premier (MVN1).

Concrètement le MVN2 qu'est ce que c'est ?

Et bien sur le principe cela est finalement assez simple : le MVN2 doit permettre (sur l'exemple du bras lors d'un tsuki), d'agrandir l'espace dans le bras (espace interne). Attention, ce mouvement d'agrandissement n'a rien à voir avec le fait d'agrandir l'enveloppe visuelle du bras. C'est là que repose toute la subtilité…

Or, le problème majeur en shotokaï (j'ai d'ailleurs appris le karaté shotokai ainsi) est que l'on porte trop souvent une importance prioritaire à l'agrandissement du mouvement sur un plan visible (plan externe). Cela peut être un vrai frein à la progression car agrandir un mouvement sur un plan externe n'implique pas que l'on soit capable d'activer le MVN2. Pire encore, une grande amplitude sur un MVN1 peut parfois complètement nuire à l'activation du MVN2.

Le risque de ne travailler que les MVN1 (car on ne sait en fait pas comment activer le MVN2 ou on ignore l'existence même de ce MVN2) est d'exécuter à terme des mouvements sans consistance, des mouvements pouvant être jolis en apparence mais trop mous et inefficaces tant sur un plan santé que martial.

Un bon keiko à mon sens doit amener à travailler ce genre de principe structurant. Il faut répéter des choses très précises pour espérer s'améliorer sinon l'entrainement ne sert pas à grand chose. Pire encore, la répétition erronée peut nous mener vers une régression technique sans même que nous nous en rendions compte. La vigilance est de mise !

Ce qu'il faut retenir : l'amplitude du mouvement est à chercher prioritairement à l'intérieur du corps et non pas uniquement à l'extérieur sous peine de ne pas ressentir le "vrai mouvement" nourrissant la technique. Le "vrai mouvement" cherche à agrandir l'espace non visible de tout le corps. Beaucoup de subtilités naissent de ce principe d'agrandissement de l'espace interne global. Rechercher l'activation de ce principe, offre une réelle renaissance structurelle du corps.

Cela dit, les règles d'application de ce principe doivent être très précises sous peine de ne strictement rien ressentir.

Je vous souhaite sincèrement de chercher sur ce principe et de voir ce que cela peut impliquer concrètement sur votre propre pratique.

Les bénéfices en sont considérables. Par ailleurs, l'utilisation des MVN2hisse réellement la pratique au rang d'art car pour utiliser les MVN2, l'esprit devra être hautement créatif… la notion "d'harmonisation corps et esprit" fera alors pleinement sens dans votre pratique, soyez en sûr !